Je tiens toujours mes promesses

- par Lauwiie

Texte par Lauwiie
Tête à tête,  coeur à coeur.  Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles. - Photo : Marie-Anne Langelier
Tête à tête, coeur à coeur. Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles.

Photo : Marie-Anne LangelierZoom


[ FAIT VÉCU ] Le 7 juillet 2008, je suis morte. Pas au sens commun du terme. Mais mon cœur venait de rendre l'âme. Une partie tout aussi importante que l'aorte venait de lui être arrachée. Souvent, on ne se rend compte de la valeur d'une chose ou d'une personne seulement lorsqu'on la perd. Et c'est lorsqu'elle nous claque entre les doigts, quand on s'y attend le moins, que l'importance qu'elle avait dans notre vie prend tout son sens. Cela faisait presque trois ans que je la prenais pour acquise. Je l'appréciais certes, je n'étais tout de même pas aveugle au point de ne pas savoir la chance que j'avais, mais je ne me rendais pas compte à quel point elle jouait un rôle vital dans mon existence. Et c'est les yeux mi-clos que j'ai fait mon petit bonhomme de chemin, que le temps est passé, que l'aiguille de l'horloge a continué d'avancer, jusqu'au jour où j'ai reçu un coup de poing en pleine figure. C'est en cette date fatidique que j'ai cessé d'exister complètement.
Tête à tête, coeur à coeur.  Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles. - Photo : Marie-Anne Langelier
Tête à tête, coeur à coeur. Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles.

Photo : Marie-Anne LangelierZoom


Mes parents, ayant des problèmes financiers, n'ont eu d'autre choix que de donner Kyrielle, ma ponette. Ce n'était pas leur faute, mais jeune et inconsciente de la peine que cela leur faisait de devoir se départir du « bonheur de leur fille », je leur en ai voulu. À cette époque, je ne savais pas que cela les affectait presque autant que moi. Pas au même niveau, mais tout de même.

Suite à cette décision définitive, le tableau si parfait de ma vie a perdu toutes ses couleurs. Comme si on avait versé une bouteille entière de Taltine sur une peinture à l'huile et que tous les pigments s'étaient dissous. N'est resté que le noir que je broyais cruellement au fond de mon âme. J'avais beau tenter éperdument de prendre le pinceau pour reconstituer cette œuvre d'art, le destin avait décidé que cette fois-ci je ne pouvais faire ma « Picasso ». J'ai fini par ranger ma trousse d'art. Durant de longues semaines, j'ai fait une dépression. Je n'ai pas vu la saison estivale passer, cloîtrée dans ma chambre à pleurer ma perte, tête enfouie dans mon oreiller. À crier et jurer que j'allais la ravoir, que nos chemins ne se séparaient que temporairement. Cependant il faut bien reprendre le cours des choses un jour ou l'autre. La vie continue, même si elle n'est plus ce qu'elle était. J'ai coupé contact avec le domaine équestre durant quelques mois, car cela faisait trop mal. Puis, ma meilleure amie m'a convaincu de recommencer à monter, car « cela allait me faire du bien ». Même si j'avais l'impression que de côtoyer un autre cheval empêchait la douleur de coaguler et de cicatriser, cela m'a tout de même permis de me raccrocher à ma passion.

Mon parcours équestre s'est donc poursuivi. Durant les années qui ont succédé, j'ai fait l'acquisition de deux chevaux, qui furent malheureusement de passage dans ma vie puisque aujourd'hui ils sont désormais dans de nouvelles familles. J'ai appris à les aimer, mais je ne cessais de les comparer à ce qui fut pour moi ma première « amie ». J'ai eu du plaisir avec mes hongres, mais quiconque me connaît sait fort bien que jamais je ne me suis remise de Kyrielle. Il ne suffisait que de prononcer son nom pour que j'éclate en sanglot, mes larmes embrouillant d'amertume les traits d'un faux bonheur que j'avais esquissé sur mon canevas. Je suis allée la revoir un an après son départ, retournant le couteau dans la plaie avec une satisfaction mi-douce mi-amère. Pauvre ponette qui a dû endurer les larmes d'une adolescente accrochée à son encolure... Ce jour-là, j'ai conclu un pacte avec elle. Je lui ai promis sur ma vie que j'allais la racheter. Peu importe si elle était malade, blessée, âgée de 30 ans ou à l'autre bout de la province, elle allait finir ses jours à mes côtés. Croyez-moi, je suis une fille de parole.

Les saisons se sont passé le flambeau, j'ai vu quatre hivers passer. Ma géhenne s'est amenuisée mais n'en n'était pas moins présente. C'est en étant soudainement éprise d'une vague d'espoir que j'ai contacté son nouveau propriétaire afin de lui demander s'il voulait la vendre. Sa réponse étant négative, je lui ai toutefois fait part de mes sentiments. « Vous savez, ce n'est pas de ma volonté que je m'en suis départie. Si ça n'avait été que de moi, jamais elle ne m'aurait quittée. On dit qu'un cavalier a deux chevaux : le cheval de ses rêves, et le cheval de sa vie. Eh bien pour moi, Kyrielle est les deux. Si un jour vous désirez la vendre, contactez-moi la première. Je veux la racheter. » C'est en sanglots que j'ai raccroché le combiné.

Mais quelle idée tordue aussi d'appeler alors que je savais d'avance la réponse... Et pourtant, six mois plus tard je recevais un coup de fil. Vivant une situation personnelle très difficile, le propriétaire de Kyrielle n'était plus en mesure de la garder. Le lendemain nous étions assis à la même table en train d'effectuer la transaction et de signer les papiers. J'ai ainsi racheté moi-même ma jument, sans même aller la voir avant de confirmer l'achat. Je ne me préoccupais pas de l'état dans lequel elle pouvait être, je la voulais toute entière avec ses qualités et ses défauts, en pleine forme ou blessée. Je ne comprends pas pourquoi cet homme m'a rappelée, moi (et je l'en remercie encore), alors qu'il y avait plusieurs autres personnes intéressées à l'acheter et ce à un prix bien trop haut pour mes moyens Je n'arrive toujours pas à réaliser la chance que j'ai, que la vie ait été assez clémente pour nous réunir à nouveau, et ce, pour de bon. Mais je lui avais dit à Kyrielle : Moi, je tiens toujours mes promesses.

Note : Si des opinions sont émises dans ce texte, elles ne reflètent pas nécessairement les opinions de poneyxpress.com.


Tête à tête, coeur à coeur.  Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles. - Photo : Marie-Anne Langelier
Un petit moment de douceur et de connexion. Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles. - Photo : Marie-Anne Langelier
Ma grande complice. Photo datant de quelques mois après nos retrouvailles. - Photo : Marie-Anne Langelier

Par Darling

Darling
Un texte & une histoire superbe ! Je vous souhaite beaucoup de bonheur ensemble. C'est bien la preuve qu'il faut croire en ses rêves et ne jamais renoncer...

Par claire68

claire68
Histoire merveilleuse et très touchante, je vous souhaite énormément de bonheurs toute les deux !

Par Jadouu

Jadouu
Wow ! Je suis tellement heureuse que kyrielle soit enfin revenu avec toi Je te souhaite plein de bonheur et donnes lui un calin de ma part

Par Lauwiie

Lauwiie
Merci pour vos bons mots Cela fait maintenant 1 an que je l'ai racheté, et tous les bons moments passés ensemble sont innombrables. Elle me rend bien l'amour que je lui porte et notre complicité est très particulière

Pas de problème Jade, je lui ferai un gros calin en ton nom Si tu es de passage dans le coin viens la voir quand tu veux, je sais que toi aussi tu y étais attachée (Et je suis persuadée qu'elle sera contente de te revoir )

Par Kilia

Kilia
Superbe texte rempli d'émotion ! J'ai vraiment apprécié te lire, tu m'as donné les larmes aux yeux ! Je te comprends tellement d'avoir fait ce geste ! Félicitation et je te souhaite de la garder le reste de sa vie !

Par Jadouu

Jadouu
oh merci beaucoup je l'ai aimé comme si c'était la mienne si je passe dans le coin je te fais signe!!